Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/130

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que les émigrés allaient chercher de l’autre côté de la frontière, et les paysans arrêtaient les fuyards. Foullon et Bertier furent de ce nombre.

Nous avons déjà parlé de la misère qui régnait à Paris et dans les environs, et des accapareurs, dont l’Assemblée refusait d’approfondir les crimes. Parmi ces spéculateurs sur la misère des pauvres, on nommait surtout Foullon, qui avait fait une immense fortune, comme financier et dans sa charge d’intendant de l’armée et de la marine. On connaissait aussi sa haine pour le peuple et la Révolution. Broglie avait voulu l’avoir pour ministre, lorsqu’il préparait le coup d’État pour le 16 juillet, et si le rusé financier refusa ce poste, dont il voyait déjà les dangers, il ne ménagea pas les conseils. Son avis était de se débarrasser d’un seul coup de tous ceux qui avaient acquis de l’influence dans le camp révolutionnaire.

Après la prise de la Bastille, lorsqu’il apprit comment la tête de de Launey avait été promenée dans les rues, il comprit qu’il ne lui restait plus qu’à suivre les princes et émigrer ; mais comme ce n’était plus commode, sous la surveillance des districts, il profita de la mort d’un de ses valets pour se faire passer pour mort et enterré, tandis qu’il sortait de Paris et se réfugiait chez un ami à Fontainebleau.

Là, il fut découvert et arrêté par les paysans, qui se vengèrent sur lui de leurs longues souffrances, de leur misère. Chargé d’une botte de foin sur les épaules, — par allusion au foin qu’il avait promis de faire manger aux Parisiens, — l’ignoble accapareur fut traîné à Paris par une foule furieuse. À l’Hôtel de Ville, Lafayette