Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/159

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

milliers d’hommes, venus de villages voisins ; ils se portaient contre les châteaux les plus forts, les assiégeaient, s’emparaient de toutes les paperasses et en faisaient des feux de joie. Les abbayes étaient saccagées et pillées, au même titre que les maisons des riches négociants dans les villes. Tout fut détruit à l’abbaye de Murbach qui probablement dut offrir de la résistance[1].

En Franche-Comté, les premiers rassemblements se faisaient à Lons-le-Saunier, déjà le 19 juillet, lorsque l’on y apprit les préparatifs du coup d’État, et le renvoi de Necker ; mais on ignorait encore la prise de la Bastille, dit Sommier[2]. Il se forma bientôt des attroupements, et la bourgeoisie arma le même jour sa milice (portant la cocarde aux trois couleurs), pour résister « aux incursions des brigands qui infestent le royaume » (pp. 24-25). Bientôt le soulèvement commença dans les villages. Les paysans se partageaient les prés et les bois des seigneurs. Ailleurs, ils forçaient les seigneurs à renoncer à leurs droits sur les terres qui autrefois avaient appartenu aux communes. Ou bien, sans autre forme de procès, ils rentraient en possession des forêts, autrefois communales. Tous les titres que l’abbaye des Bernardins possédait dans les communes voisines lui furent enlevés (Édouard Clerc, Essai sur l’histoire de la Franche-Comté, 2ème éd., Besançon 1870). À Castres, les

  1. Selon Strobel (Vaterländische Geschichte des Elsasses), le soulèvement se produisait généralement ainsi : un village se révoltait, et là-dessus il se formait une bande, composée d’habitants de divers villages, qui allaient ensemble attaquer les châteaux. Quelquefois ces bandes devaient se cacher dans les bois.
  2. Histoire de la Révolution dans le Jura, Paris, 1846, p. 22. On voit, par une jolie chanson, donnée dans le cahier d’Aval, quelle était la tournure d’esprit dans le Jura.