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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/242

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porte de relever dans cette fête, outre l’affirmation d’une nouvelle nation, ayant un idéal commun, – c’est la frappante bonhomie de la Révolution. Un an après la prise de la Bastille, alors que Marat avait toute raison d’écrire : « Pourquoi cette joie effrénée ? pourquoi ces témoignages stupides d’allégresse ? La Révolution n’a été encore qu’un songe douloureux pour le peuple ! » alors que rien n’avait encore été fait pour satisfaire les besoins du peuple travailleur, et que tout avait été fait (nous allons le voir tout à l’heure) pour empêcher l’abolition réelle des abus féodaux, – alors que le peuple avait eu à payer surtout, de sa vie et d’une affreuse misère, les progrès de la Révolution politique, – malgré tout cela, le peuple éclatait en transports à la vue du nouveau régime démocratique affirmé à cette fête. Comme cinquante-huit ans plus tard, en février 1848, le peuple de Paris mettra trois mois de misère au service de la République, de même maintenant, le peuple se montrait prêt à tout supporter, pourvu que la Constitution lui promît d’apporter un soulagement, pourvu qu’elle y mît un peu de bonne volonté.

Si, trois ans plus tard, ce même peuple, si prêt à se contenter de peu, si prêt à attendre, devint farouche et commença l’extermination des contre-révolutionnaires, c’est qu’il y eut recours comme au moyen suprême de sauver quelque chose de la Révolution, – c’est qu’il la vit sur le point de sombrer, avant d’avoir accompli aucun changement substantiel dans la voie économique, pour le peuple.

En juillet 1790, rien ne fait présager ce sombre et farouche caractère. « La Révolution n’a été encore