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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/288

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en modifiant les lois sur l’héritage, à démocratiser la propriété, à répandre les propriétés entre un plus grand nombre de personnes.

Ils détruisirent pour toujours les distinctions politiques entre les divers « ordres », — clergé, noblesse, tiers-état, ce qui, pour l’époque, était immense : il suffit de voir avec quelle difficulté cela se fait encore en Allemagne, ou en Russie. Ils abolirent les titres de noblesse et les privilèges sans nombre qui existaient alors, et ils surent trouver des bases plus égalitaires pour l’impôt. Ils surent éviter la formation d’une chambre haute, qui eût été une forteresse de l’aristocratie. Et, par la loi départementale de décembre 1789, ils firent quelque chose d’immense pour faciliter la Révolution : ils abolirent tout agent du pouvoir central en province.

Ils enlevèrent enfin à l’Église ses riches possessions et ils firent des membres du clergé de simples fonctionnaires de l’État. L’armée fut réorganisée ; de même les tribunaux. L’élection des juges fut laissée au peuple. Et en tout cela, les bourgeois législateurs surent éviter trop de centralisation. Bref, au point de vue législation, nous les voyons hommes habiles, énergiques, et nous trouvons chez eux un élément de démocratisme républicain et d’autonomie, que les partis avancés contemporains ne savent pas suffisamment apprécier.

Et cependant, malgré toutes ces lois, il n’y avait encore rien de fait. La réalité ne répondait pas à la théorie. Car — et c’est là l’erreur générale de ceux qui ne connaissent pas de près le fonctionnement de la machine gouvernementale, — il existe tout un abîme