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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/352

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Les chances de la contre-révolution étaient si grandes à ce moment (fin juillet 1792) que Louis XVI refusa net la proposition des Girondins. Les Prussiens ne marchaient-ils pas déjà sur Paris ? Lafayette, ainsi que Luckner, n’étaient-ils pas prêts à tourner leurs armées contre les Jacobins, contre Paris ? Et Lafayette jouissait d’une grande puissance dans le Nord. À Paris, il était l’idole des gardes nationales bourgeoises.

Le roi n’avait-il pas en effet toutes les raisons pour espérer ? Les jacobins n’osaient pas agir ; et lorsque Marat, le 18 juillet, après que la trahison de Lafayette et de Luckner devint connue (ils voulaient enlever le roi, le 16 juillet, et le mettre au centre de leurs armées), lorsque Marat proposa de prendre le roi comme otage de la nation contre l’invasion étrangère, — tous lui tournèrent le dos, le traitèrent de fou, et il n’y eut que les sans-culottes pour l’applaudir dans leurs taudis. Parce qu’il avait osé dire à ce moment ce qu’aujourd’hui nous savons être la vérité, parce qu’il osa dénoncer les complots du roi avec les étrangers, Marat se vit abandonné de tout le monde, — même de ces quelques patriotes jacobins sur lesquels, lui qu’on représente si soupçonneux, avait cependant compté. Ils lui refusèrent jusqu’à l’asile, lorsqu’on chercha à l’arrêter et qu’il frappa à leurs portes.

Quant à la Gironde, après que le roi eut refusé sa proposition, elle parlementait de nouveau avec lui, par l’intermédiaire du peintre Boze ; le 23 juillet, elle lui envoyait encore un nouveau message.

Quinze jours seulement séparaient Paris du 10 août. La France révolutionnaire rongeait son frein. Elle com-