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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/98

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naire accompli dans les masses, sans un appel au peuple pour la révolte, fait directement d’homme à homme et non pas par des manifestes, — une assemblée de représentants reste fort peu de chose vis-à-vis d’un gouvernement établi, avec son réseau de fonctionnaires, son armée.

Heureusement, Paris veillait. Pendant que l’Assemblée s’endormait dans une sécurité imaginaire et reprenait tranquillement, le 10 juillet, la discussion du projet de Constitution, le peuple de Paris, auquel les plus audacieux et les plus perspicaces de la bourgeoisie avaient enfin fait appel, se préparait à l’insurrection. On se répétait dans les faubourgs les détails du coup de filet militaire que la Cour était en train de préparer pour le 16 ; on savait tout — jusqu’à la menace du roi de se retirer à Soissons et de livrer Paris à l’armée, — et la grande fournaise s’organisait dans ses districts pour mieux répondre à la force par la force. Les « auxiliaires séditieux », dont Mirabeau avait menacé la Cour, avaient été appelés en effet, et dans les sombres cabarets de la banlieue, le Paris pauvre, en guenilles, discutait les moyens de « sauver la patrie ». Il s’armait comme il pouvait.

Des centaines d’agitateurs patriotes, — des « inconnus », bien entendu, — faisaient tout pour maintenir l’agitation et attirer le peuple dans la rue. Les pétards et les feux d’artifice, dit Arthur Young, étaient un des moyens en vogue ; on les vendait à moitié prix, et quand une foule se rassemblait pour voir tirer un feu d’artifice au coin d’un carrefour, quelqu’un commençait à haranguer le peuple et lui racontait les nouvelles des complots de