Aller au contenu

Page:Léo Taxil - Les trois cocus.pdf/132

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
120
LES TROIS COCUS

sonne dont la visite peut être suspectée ; mais cela ne le rassure point.

Pour éprouver la fidélité de son épouse, il lui écrit lui-même une déclaration qu’il signe du prénom d’un cousin dont il se méfie, il va même jusqu’à indiquer un rendez-vous. Madame brûle la lettre et défend sa porte au cousin qui ne comprend pas le motif de cette conduite. Le cocu imaginaire a tout épié ; mais il n’est pas pour cela le moins du monde satisfait. Rien ne peut lui ôter du cerveau l’idée que tout l’univers est d’accord pour le tromper.

Il annonce un grand voyage de deux ou trois mois ; il part le matin et revient à l’improviste à onze heures du soir. Son épouse, qu’il trouve seule, se montre fort étonnée de ce brusque retour. Il ne l’explique qu’en bouleversant tous les placards et en mettant la maison sens dessus-dessous. Il ne trouve rien, et, loin d’être convaincu, est furieux justement de n’avoir rien trouvé.

Celui-là !… on ne lui fera jamais perdre l’idée qu’il est cocu. — Il ne l’est pas encore, mais il le sera.

IV

Le Cocu doré sur tranches.

Il le sait, il en est certain ; il est comme Thomas, il a mis le doigt dans la plaie. Mais ça lui est bien égal ; il y trouve son compte.

Sa femme est jolie, il met à profit sa beauté. Les attraits de son épouse se transforment pour lui en fleuve Pactole.

Son commerce prospère, les clients affluent autour de son comptoir. Il est complaisant, il ferme l’œil. Il offre même des bocks aux amis de sa chère et tendre.

Son air est réjoui. Ses vêtements sont toujours à la dernière mode. Sa chaîne de montre est enjolivée de breloques éclatantes. Il s’est tellement bien fait l’âme de son cocuage que personne n’ose plus le blaguer.

Il parle lui-même de ses cornes, qu’il appelle orgueilleusement « des cornes d’abondance. »

V

Le Cocu philosophe.

C’est un homme navré. Il la appris un beau matin par hasard ; ça lui a fait de la peine.