Aller au contenu

Page:Léo Taxil - Les trois cocus.pdf/212

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
200
LES TROIS COCUS

— C’est singulier qu’elles fassent coïncider comme moi leur pèlerinage avec celui de M. Robert !

La série des étonnements n’était pas terminée.

Dix minutes avant l’heure marquée pour le départ du train, ce fut l’abbé Huluberlu qui arriva, muni de tout un assortiment de valises et de sacs de nuit. Puis l’abbé Chaducul parut à son tour, avec une égale provision de malles et autres objets de voyage.

Une voiture suivait, pleine de meubles analogues.

On eût dit qu’ils étaient chargés, à eux deux, de toutes les valises d’un séminaire.

Ils firent enregistrer tout cela, prirent une provision de billets de première classe, et restèrent quelques instants dans la salle d’attente.

Alors, on vit entrer ta marquise de Rastaquouère, accompagnée de treize jeunes personnes aux minois plus ou moins fripons.

Tout un pensionnat de demoiselles, quoi !

Les deux piètres échangèrent un rapide salut avec la présidente et montèrent dans le wagon qu’ils avaient retenu.

Huluberlu s’installa avec la marquise et six demoiselles dans un compartiment, et le vicaire dans le compartiment d’à côté avec sept demoiselles.

La marquise avait tenu à être de la partie, d’abord parce qu’elle ne pouvait se séparer de son pensionnat, ensuite pour ne pas laisser deux messieurs avec treize jeunes personnes ; ce qui eût été un mauvais chiffre.

Toute réflexion faite, le personnel du temple de la rue de Rennes n’était pas venu au grand complet. Huluberlu et Romuald n’étaient certes point, comme on pense, les seuls chevaliers des Maçonnes de l’Amour. Qu’auraient dit les autres chevaliers, si pendant quinze jours ils avaient trouvé le temple désert ?

On avait donc tiré au sort treize noms de voyageuses, et les autres Maçonnes avaient été confiées à la garde de la sœur Redoutable, personne aussi sage qu’expérimentée.

Tandis que les employés du chemin de fer procédaient à la vérification des billets, survint l’abbé Groussofski, flanqué d’Irlande, dont le visage respirait le plus parfait bonheur, et de Scholastique, qui se livrait à toutes sortes de contorsions. On les inséra dans le premier compartiment venu qui restait libre, la locomotive poussa ses sifflements aigus, et le train se mit en marche.

Au numéro 47 du boulevard Saint-Michel, ce même soir, le père Orifice éprouva une bien vive émotion.