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Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/110

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LE MONDE DES IMAGES.

influence légitime sur ses contemporains. Mais son vice congénital le tenait, et dru, allant jusqu’à brider ses facultés créatrices.

La perversion, par dérèglement des personimages, revêt parfois une forme sentimentale, mêlée d’attendrissement facile et de cruauté. Celle-ci rejoint la perversion sexuelle appelée masochisme, du nom du sinistre juif allemand Sacher Masoch, qui la décrivit et la pratiqua. Nous entrons ici dans le domaine réservé des combinaisons pathético ou érotico-mentales, dont les personimages deviennent aisément les protagonistes, et qui font, de certains aliénés moraux, des dramaturges ignorés du public ; les pièces qu’ils inventent et qu’ils forgent avec les débris de leurs figures héréditaires, n’en peuvent pas moins troubler la paix sociale et amener d’étranges convulsions. Les véritables révolutionnaires anarchistes rentrent dans cette catégorie, soit qu’ils demeurent aux confins de l’absurde doctrine et de l’action, soit qu’ils passent carrément à l’action criminelle.

Le type classique en est Marat, inventeur, théoricien et bourreau, au masque caractéristique, à la prose sèchement enflammée et dont l’influence (devenue incompréhensible) tenait au tourbillon sentimental sexuel qui se dégageait de ses hérédofigures. Les sensibles-cruels, les attendris persécuteurs attirent dans leur atmosphère trouble tous les mal équilibrés et tous ceux, parmi les simples et les incultes, que ne défend pas une certaine