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Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/23

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sons, l’image claire et géométrique de la vitre ensoleillée s’efface. C’est là un aperçu sommaire du travail d’efflorescence continuel, qui s’effectue au sein de notre conscience, et s’entrelace au spectacle sensible du monde extérieur. La vie mentale est un tissu double, composé d’impressions venues du dehors et du dedans, aux combinaisons brillantes et presque infinies. Elle est la conjonction perpétuelle de notre personnalité en voie de formation et des fantômes de nos ascendants. Nous sommes, vous et moi, une circonstance présente baignée dans le passé, lancée vers l’avenir, une déflagration continue d’images anciennes, associées étroitement à des images récentes, le tout sous le contrôle du soi.

Cette expérience de l’œil peut être renouvelée pour l’oreille, le goût, le tact ou l’odorat, avec cette différence que la vue, est chez la plupart des gens, le sens le plus exercé. Quel que soit le domaine sensible, l’observateur de soi-même discernera toujours assez vite le souvenir de la sensation immédiate d’avec la réminiscence déjà éloignée ou lointaine. Le phénomène est trop courant pour que j’y insiste davantage. Néanmoins, je recommande cet exercice aux débutants en psychologie introspective, comme le plus propre à leur faire comprendre l’infinie richesse de la conscience. Ces trésors ignorés ne sont comparables qu’aux trésors inemployés de notre volonté. La plupart des gens quittent ce monde sans se douter du torrent d’images qui les a traversés et du torrent de petites