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Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/241

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L’ÉLIMINATION DES PERSONIMAGES.

Les tempéraments oniriques (variété des tempéraments imaginatifs) sont ceux chez qui les hérédofigures sont accompagnées, même dans le rythme diurne et actif, de la fluorescence nocturne. Ils se meuvent, parlent, participent à la vie ambiante, au milieu d’un halo de songe. Ils ne discernent plus les limites du possible, ni de l’impossible. Ils bravent des périls dont ils se figurent qu’ils s’évanouiront au dernier moment. Ils n’écoutent ni conseil ni avis, et leur distraction est intense. La joie et la douleur sont ressenties par eux comme à demi détachées d’eux-mêmes, comme perçues à travers un autre. Impossible de fixer leur attention, d’obtenir d’eux une réponse précise à une question, même vitale pour eux. Ou bien, à côté de leur existence, ils en construisent une autre, qui fait croire au dédoublement de leur personnalité, alors qu’une partie de cette personnalité est seulement endormie et rêvante. Chez les femmes, plus sujettes à l’onirisme que les hommes, cette propension donne lieu à des contrastes fort inattendus : la vertueuse cédera tout-à-coup à une impulsion, qui s’emparera d’elle presque à son insu. La rouée aura un accès de franchise soudain et qui la perdra. Tout ceci sera la conséquence d’une mauvaise répartition des personimages entre le sommeil et la veille, ou d’une intervention de personimages, elles-mêmes chargées d’un excédent de rêve. Car l’onirisme est souvent congénital et il est aussi contagieux. C’est un des bagages de l’hérédo.

Il faut distinguer le rêve spontané, chez le dormeur,