Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/82

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(c’est-à-dire d’une partie, d’une parcelle de personimage) par l’érection et la jouissance solitaire. C’est ainsi que la caricature individualiste de l’amour peut faire ensuite grimacer toute la vie sexuelle et aboutir a cette catastrophe : l’aliénation morale.

Le terme d’« aliénation » indique que l’on ne s’appartient plus. Mais, alors que, dans l’aliénation mentale caractérisée, le délire est manifeste, diffus, et porte sur toutes les circonstances, grandes et petites, de l’existence, rendant caducs tous les contrats, dans l’aliénation morale le délire est caché, circonscrit, souvent invisible, sauf aux yeux exercés, et porte sur les perspectives, sensuelles, sensitives, émotionnelles de la conscience. Le retentissement intellectuel de ce trouble profond existe toujours, mais dissimulé, quelquefois sous les espèces de l’originalité outrancière et du talent quasi génial. Encore que je n’admette le terme de génie qu’appliqué au grand et souverain équilibre : un Aristote, un Platon, un Léonard de Vinci, un Gœthe, un Mistral.

L’aura sexuelle, cette puissante et redoutable cause de dérèglement des personimages (dont les conséquences organiques peuvent être incalculables, car elle détermine, au sein des tissus, de brusques variations électriques et thermiques), l’aura sexuelle est ressentie par tous. Cependant il n’en existe pas de bonne description, ni absolument sincère. Les uns dissimulent, les autres amplifient. Presque tous mentent, en moins ou en plus. Il faut tenir compte,