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Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/87

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sexuelle, plus ou moins éveillée, selon les cas. L’axiome est éternellement vrai : maxima debetur puero revenntia. On n’exagérera jamais, en telle matière, les bienfaits de l’ignorance heureuse. Fous, triples fous, les éducateurs qui s’imaginent que la réalité toute nue, précocement apprise et exposée, est une garantie contre le vice ! Par l’aura qui s’attache aux questions sexuelles, et qui ne tient pas seulement à leur secret, cette réalité agira, au contraire, comme stimulant. La mise en garde technique, les sermons documentés contre la débauche sont un aiguillon de la débauche. Pour l’enfant, comme pour le tout jeune homme, la chasteté, c’est la santé. L’ignorance du vice et de la débauche est une solide garantie de la chasteté.

Que chacun de mes lecteurs consulte ses souvenirs et il reconnaîtra la justesse de cette observation.

Qui donc connaît mieux que le médecin ou le pharmacien les périls de la morphinomanie ? Or c’est parmi les médecins et les pharmaciens qu’on rencontre, proportionnellement, le plus grand nombre de morphinomanes. Il est faux que le statuaire, le doucheur, le gynécologue soient garantis contre la sensualité par la fréquentation de la nudité féminine. Au contraire, la proximité, la connaissance profonde d’un piège, d’un penchant, d’une manie favorisent la chute, loin d’en préserver. Le spécialiste en sirènes est plus exposé à succomber au charme fatal que le nautonnier qui, par hasard, passe dans le champ sonore des sirènes.