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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/273

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DOGMES ET MAROTTES SCIENTIFIQUES.

telle et l’atmosphère médicale d’antidieu si compacte, que le nouvel et inconsistant évangile fut accueilli dans un respect total ; que dis-je, avec une vénération prosternée ! D’abord il y allait de la carrière des jeunes agrégés, admis à vérifier la branlante certitude, et des médecins des hôpitaux, qui auraient eu la velléité de la contredire, en s’avérant ainsi « calotins ». J’ai entendu la phrase, je ne l’invente pas : « Seuls les calotins pourraient nier, aujourd’hui, la circonvolution du langage ! » Ensuite la critique philosophique était nulle, dévastée par le kantisme et le spencerisme. Les philosophes de quelque valeur, un Lachelier, un Boutroux, étaient inhibés de respect devant cette Salpétrière, où la force de persuasion de Charcot fabriquait, à la douzaine, des hystériques, des somnambuliques, des cataleptiques, ainsi que des autopsies d’aphasiques, porteurs obéissants de leur lésion selon saint Broca, et conformes au schéma de la Cloche. Il ne se trouva pas un critique de quelque envergure (je dis pas un) pour démontrer l’absurdité préliminaire d’une thèse localisant la fonction du langage articulé dans tel ou tel groupe de cellules nerveuses, de ces cellules dont on ignore, du reste, le fonctionnement. Cette acceptation en bloc d’une simili explication baroque, bonne pour des sauvages des Iles sous le vent (sous le vent de l’erreur), fut accueillie, les yeux fermés, par les Instituts, les Facultés, les Académies. Les psychologues s’y conformèrent. Les métaphysiciens ou prétendus tels (nous avons vu qu’il n’y