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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/275

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DOGMES ET MAROTTES SCIENTIFIQUES.

déchausser de la faculté du langage articulé le pied de la troisième frontale gauche. C’est cependant ce qui arriva.

Le mercredi 1er mars 1922, paraissait dans la Presse médicale, résumant de lents et patients travaux sur la question et de nombreuses observations, une leçon magistrale de Pierre Marie, qui sonnait le glas de la grande erreur. Cette leçon était ainsi intitulée : Existe-t-il, dans le cerveau humain, des centres innés ou préformés du langage ? Après une forte et lumineuse discussion, d’une irrésistible logique, appuyée sur le bon sens et de multiples cas cliniques et coupes anatomiques, l’auteur concluait que non, que de tels centres n’existent pas. C’était le déboulonnement de l’idole, au milieu de la stupeur consternée, mais silencieuse, de ses derniers adorateurs. Car, depuis dix ans, un sourd travail de délitement s’accomplissait dans les profondeurs du temple. Les fidèles adeptes de la Broca-Charcot entendaient des voix mystérieuses qui murmuraient : « C’est une chimère. On s’est trompé. On vous a trompés. Il n’y a pas de localisation cérébrale du langage articulé. »

Voici la conclusion de Pierre Marie. Il faut en dégager les suprêmes concessions, faites par le disciple émancipé aux idées professées dans sa jeunesse (car mon avis est que toutes les localisations cérébrales, les motrices comme les psychiques, sont destinées à disparaître, dans une interprétation toute différente des expériences sommaires qui les avaient fait admettre). Il faut en retenir l’essentiel, qui est