Aller au contenu

Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/311

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
305
CONCLUSION.

avec l’apologie du curare. Ce lecteur ne s’en aperçoit pas. Sa ruine, l’effondrement de sa famille, le massacre périodique de ses enfants, ne lui ouvrent nullement les yeux. C’est un dévot des contradictions et âneries imprimées, dont il se régale chaque soir. Le catoblépas, qui se rongeait les pieds, sans s’en apercevoir, était un animal intelligent et éveillé, à côté de lui.

Je sais que le présent ouvrage apparaîtra à beaucoup comme un sacrilège philosophique, politique, scientifique, littéraire, comme un blasphème affreux, etc… C’est l’habituel concert des grenouilles, frappées au bon endroit de leur petit pantalon verdâtre. Je sais aussi qu’avant dix ans il fera l’effet d’une bergerie, vu l’immense écroulement de chimères sanglantes qui sera alors accompli, au milieu d’un déluge de malédictions. Avant dix ans, avant cinq ans peut-être la France devra être monarchique, ou elle ne sera plus ; car la France est de constitution familiale, et la famille et la démocratie sont aussi antinomiques que la Patrie et la démocratie.

Ce qui perd les âges, comme les individus, c’est l’orgueil. Cet orgueil est la marque distinctive du XIXe siècle, sur tous les plans et dans tous les domaines. Il ignore résolument l’humilité, cette vertu suprême et qui tend à ses rares adeptes la clé des deux univers, l’intime et l’extérieur. Ses prototypes sont des orgueilleux : un Bonaparte, un Chateaubriand, un Hugo, un Berthelot, un Renan. Celui-ci est un orgueilleux rude et sommaire ; cet