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Page:L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, 1910.djvu/53

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L’ŒUVRE DE GIORGIO BAFFO

Est une créature qui tant vous fait plaisir,
Qu’on la peut appeler objet divin.

Ce pied mignon, cette petite jambe,
Ce gentil corsage serré à la taille,
Font voir qu’elle est une œuvre parfaite,
Et d’une chair délicate et fine.

Il me semble qu’il jouit du vrai et parfait bonheur,
L’homme qui déguste une si délicate bouchée,
Et qu’au monde il n’est pas de plus grand régal.

Si une ballerine s’était trouvée là,
Quand Jupiter s’est changé en oiseau,
C’est elle qu’il eût enfilée, et pas une autre.

MÊME SUJET

Pour ses méchant vingt-trois sous,
Manger une merveilleuse salade,
Du pain, du rôti, boire en désespéré,
Regarder les ballets, écouter la musique ;

Se placer à une table, commodément assis,
Avoir à son côté sa grande gourgandine,
Patiner d’une main libre, par-ci par-là,
Et le cu-cul et la moniche et les tétins ;

Certes, il me semble fou à lier,
L’homme qui pour vingt-trois sous, au jour d’à présent,
Ne jouit pas de ces délices à pleine panse ;

Mais me survient une fort morale réflexion :