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Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/469

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croisade contre les albigeois.

abandonné par la fortune : il perd l’affection du monde et reste avec sa faute. [6600] Moi qui vous aime de cœur et souffre le dommage avec vous, je dois vous avertir quand vous faites erreur et péché. Si vous avilissez Toulouse, vous serez vous-même abaissé, car si fortune perd, loyauté gagnera, et là[1] est Parage, et cœur et richesse, [6605] et force et seigneurie[2] et ville capitale. Je ne dis pas pour cela que vous ne la prendrez pas : elle sera bientôt conquise, si vous continuez aussi bien que vous commencez ; et puisque la chrétienté entière vous vient en aide, ce n’est pas merveille si vous en venez à bout. [6610] Mais, par sainte Marie toute resplendissante, avant que Toulouse soit à vous, que vous la teniez, paradis et enfer seront de nouveau peuplés, et mainte âme sera orpheline et à l’abandon. — Alain, » dit le comte, « c’est trop de remontrances. [6615] Si je perds, si je m’affaiblis, vous n’y gagnez rien. Si j’ai perdu Toulouse, je tiens encore les dés[3] ; et, par le saint chrême de mon baptême, tout le temps qui me reste à vivre je les tiendrai assiégés jusqu’à ce que j’y perde la vie ou que je les aie soumis. — [6620] Sire comte, » dit l’évêque béni et sacré, « que le Seigneur qui vous fit naître, s’il veut être honoré, considère votre droit et voie leurs péchés ! — Avec cela, » dit le comte, « je me tiendrai pour satisfait. » Et là-dessus il donne ses ordres aux messagers : « Allez [6625] par toutes

  1. Dans Toulouse.
  2. Je suis maintenant porté à proposer pour le v. 6605 E fors’e senhoria.
  3. C.-à-d. la partie n’est pas finie.