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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/20

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critique. Les mémoires du temps assurent que Blin de Saint-Maure se vengea d’un article de Laharpe inséré dans le Mercure, sur ou plutôt contre un de ses ouvrages, en attaquant le critique dans la rue au moment où bien paré et poudré celui-ci se rendait à une assemblée de beaux-esprits. Les querelles de Laharpe avec Dorat furent si vives, que l’académie française se vit obligée de l’engager à plus de modération ; l’abbé de Boismont disait à ce sujet : « Nous aimons tous infiniment M. de Laharpe, mais on souffre en vérité de le voir arriver sans cesse l’oreille déchirée. » Quant à cette querelle entre Laharpe et Dorat, elle fut apaisée par les jolies femmes qui étaient également éprises pour les beaux vers de l’un et les galantes bagatelles de l’autre. Le premier avait fait une tragédie touchante sur un événement tragique qui était arrivé depuis peu. C’était le suicide d’une religieuse que le désespoir avait porté à cet acte violent. Ne pouvant espérer de faire jouer cette pièce en public, Laharpe en faisait la lecture dans les sociétés ; on la représenta chez M. d’Argental, ainsi que chez madame de Cassini, qui joua le rôle de religieuse, tandis que l’auteur se chargeait de celui du héros de la pièce. La plus belle assemblée assista à cette représentation. Dorat s’y trouva sous les auspices de la maîtresse de la maison, et se réconcilia solennellement avec l’auteur de Mélanie, en dépit de toutes les épigrammes qu’ils s’étaient mutuellement lancées. L’archevêque de Paris fut scandalisé de la nouvelle de la représentation d’un sujet religieux, et obtint que la seconde représentation ne pût avoir lieu. Telle était alors la puissance du clergé.

Il paraît que la réconciliation politique des deux