Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/308

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du roi de France. Ensuite Russel proposa celle du roi d’Angleterre. Tout le monde la but successivement jusqu’à Roberts ; mais Russel ayant mêlé dans le punch quelques bouteilles de vin pour le fortifier, Roberts, qui avait de l’aversion pour ce mélange, demanda qu’il lui fût permis de boire cette santé avec un verre de vin. Ici Russel se mit à blasphémer en jurant qu’il lui ferait boire une rasade de la même liqueur que la compagnie. « Eh bien ! messieurs, reprit Roberts, je boirai plutôt que de quereller, quoique cette liqueur soit un poison pour moi. Tu boiras, répondit Russel, fût-elle pour toi le plus affreux poison, à moins que tu ne tombes mort en y portant les lèvres. » Roberts prit le verre, qui tenait presque une bouteille entière, et porta la santé qu’on avait nommée. « La santé de qui ? interrompit Russel ; mais, dit l’autre, c’est la santé qu’on vient de boire, celle du roi d’Angleterre. Et qui est-il, le roi d’Angleterre ? demanda Russel. Il me semble, lui dit Roberts, que celui qui porte la couronne est roi, du moins pendant qu’il la porte. Et qui la porte ? insista Russel. C’est le roi George , répondit Roberts. » Alors Russel entra en furie, s’emporta aux dernières injures, et jura que les Anglais n’avaient pas de roi. « Il est surprenant, lui dit Roberts, que vous ayez proposé la santé d’un roi dont vous ne reconnaissez pas l’existence. » Le furieux corsaire, sautant sur un de ses pistolets, l’aurait