Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Saint-Vincent est une île déserte. M. de Gennes, capitaine français, y trouva vingt Portugais de Saint-Nicolas qui s’y occupaient depuis deux ans à tanner des peaux de chèvres, dont le nombre est fort grand. Ils ont des chiens dressés pour cette chasse. Un seul prend ou tue chaque nuit douze ou quinze de ces animaux. Frézier raconte qu’il trouva dans la baie quelques cabanes dont les portes étaient si basses, qu’on n’y pouvait entrer qu’en rampant sur ses mains. Pour meubles, il y vit de petites bougettes de cuir, et des écailles de tortues qui servaient de siéges et de vases pour l’eau. Les habitans, qui étaient des Nègres, avaient pris la fuite à la vue des Français. On en découvrit quelques-uns dans les bois, mais sans pouvoir les joindre et leur parler. Ils étaient tout-à-fait nus.

À l’exception des chèvres sauvages, dont il est fort difficile d’approcher, on ne trouva point d’autres animaux qu’un petit nombre de pintades. La terre est si stérile, qu’elle ne produit aucun fruit ; seulement on rencontre dans les vallées de petits bois de tamarins et quelques arbustes de coton. M. de Gennes y découvrit aussi quelques plantes curieuses, telles que l’euphorbe arborescente, et une aurone d’une odeur et d’une verdure admirables ; une fleur jaune dont la tige est sans feuilles; le ricin, que les Espagnols du Pérou appellent pillerilla, et dont ils prétendent que les feuilles, appliquées sur le sein des nourrices, attirent le lait. Sa semence ressemble exactement au pépin de la pomme des Indes ;