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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/405

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découverte du Nouveau-Monde élevaient, au-dessus de tous les souverains de son siècle. Il paraît qu’il ne faut pas lui attribuer les cruautés commises en Amérique. Elle recommandait avec instance à ceux qu’elle envoyait pour gouverner de traiter ces peuples comme les Castillans mêmes ; et jamais elle ne fit éclater plus de sévérité que contre ceux qui contrevenaient à cette partie de ses ordres. On a vu ce qu’il en coûta aux Colomb pour avoir souffert qu’on ôtât la liberté à quelques Américains. Cependant elle aimait les Colomb ; elle connaissait tout leur mérite. Elle attachait un juste prix à leurs services. On ne douta point en Espagne que sa mort n’eût sauvé le gouverneur Ovando d’un châtiment exemplaire pour le massacre de Xaragua, dont elle avait appris la nouvelle avec beaucoup de chagrin ; et dans son testament, elle insista encore sur les bons traitement dont il fallait user envers les Américains.

Personne ne perdit plus que les Colomb à la mort de cette grande reine. L’amiral comprit d’abord qu’il tenterait inutilement de se faire rétablir dans sa dignité de vice-roi. Cependant, pour ne pas se manquer à lui-même, après avoir pris quelques mois de repos à Séville, il partit avec son frère pour Ségovie, où la cour était alors ; et, dans une audience particulière du roi, qui les reçut tous deux avec quelque apparence de satisfaction, il lui fit un récit fort touchant de ses longs et pénibles services. Fer-