Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 14.djvu/104

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les yeux d’un côté, on découvre la vaste mer du Sud si fort, au-dessous de soi, que la vue en est éblouie. De l’autre côté, on n’aperçoit que des pointes de rochers et des précipices de deux ou trois lieues de profondeur. Entre deux spectacles si capables de glacer le sang, le passage ou le chemin n’a pas, dans quelques endroits, plus d’une toise de largeur. Quoique le vent fût diminué, nous n’eûmes pas la hardiesse de passer sur nos mulets. Nous en laissâmes la conduite aux Américains, et, nous courbant sur les mains et les genoux, sans oser jeter un regard de l’un ni de l’autre côté, nous passâmes aussi vite qu’il nous fut possible, l’un après l’autre, sur les traces et dans la posture des bêtes qui passèrent devant nous. Aussitôt que nous nous vîmes dans un lieu plus large, entre des arbres, où la crainte nous permit de nous relever, nous regardâmes plus hardiment derrière nous ; mais nos premières réflexions tombèrent sur notre folie qui nous avait fait prendre un si dangereux chemin pour gagner quelques jours de route que nous n’avions pas moins perdus. De là nous nous rendîmes sans peine à la ferme de don Juan de Tolède, où, dans l’affaiblissement de nos forces par le jeûne, la fatigue et la crainte, notre estomac eut besoin de quelque temps pour souffrir d’autre nourriture que des bouillons et du vin. »

L’Yucatan est une presqu’île située entre les golfes de Campêche et de Honduras. Sa capi-