Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/111

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ceux qui marchent dessus, ou qui ont l’imprudence de les irriter.

« Dans les pays que le Maragnon arrose, dit Ulloa, on trouve un serpent aussi affreux par sa grosseur et sa longueur que par les propriétés qu’on lui attribue. Pour donner une idée de sa grandeur, plusieurs disent qu’il a le gosier et la gueule si larges, qu’il avale un animal, et même un homme entier. Mais ce qu’on en raconte de plus étrange, c’est qu’il a dans son haleine une vertu si attractive, que, sans se mouvoir, il attire à lui un animal, quel qu’il soit, lorsqu’il se trouve dans un lieu où cette haleine peut atteindre. Cela paraît un peu difficile à croire. Ce monstrueux reptile s’appelle, en langue du pays, yacumama, mère de l’eau, parce qu’aimant les lieux marécageux et humides, on peut le regarder comme amphibie. Tout ce que j’en puis dire, après m’en être exactement informé, c’est qu’il est d’une grandeur extraordinaire. Quelques personnes graves mettent aussi cet animal dans la Nouvelle-Espagne, l’y ont vu, m’en ont parlé sur le même ton ; et tout ce qu’elles m’ont dit de sa grosseur s’accorde avec ce qu’on raconte de ceux du Maragnon, à l’exception seulement de la vertu attractive. »

En permettant qu’on suspende son opinion sur les particularités du récit vulgaire, ou même qu’on les rejette comme suspectes, parce qu’elles peuvent être l’effet de l’admiration et de la surprise, qui font adopter assez commu-