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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/257

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Il nous dit en fort bon portugais qu’il était chrétien, et qu’ayant été conduit en Portugal, il avait été baptisé sous le nom d’Antonio. Quoique Margaja, et déterminé à souffrir courageusement la mort, il nous fit entendre qu’il ne serait pas fâché de nous devoir la vie. Nous fûmes touchés de compassion : un des nôtres, serrurier de profession, qui savait assez l’espagnol pour entendre quelque chose du portugais, lui promit une lime pour couper ses fers, et convint avec lui que, se dérobant à ses gardes, tandis que nous nous efforcerions de les amuser, il irait nous attendre dans un petit bois voisin, où nous aurions pu le prendre en retournant à notre île. Cette espérance l’avait jeté dans un transport de joie. Mais, sans avoir entendu ce qu’on lui avait offert, les sauvages conçurent quelque soupçon de notre entretien. À peine fûmes-nous sortis du village, qu’ayant appelé leurs voisins pour assister à la mort du prisonnier, ils le massacrèrent ensemble, le lendemain nous retournâmes chez eux avec une lime et d’autres secours, sous prétexte de leur demander des vivres ; mais, sans nous répondre, ils nous menèrent dans un lieu où nous vîmes les pièces du corps d’Antonio sur le boucan ; et, s’applaudissant de nous avoir trompés, ils finirent par nous montrer la tête avec des éclats de rire. Un autre jour, deux Portugais se laissèrent surprendre par nos sauvages dans une petite maison de terre assez voisine d’un de leurs forts, qui se nommait