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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/128

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occupation de courir les bois et les lacs pour se procurer des pelleteries : ces longs et fréquens voyages les avaient accoutumés à mener une vie fainéante, qu’ils avaient peine à quitter quoique le peu de valeur du castor eût réduit presqu’à rien le fruit de leurs courses. La conduite des Anglais dans les colonies voisines avait été bien différente. Sans perdre le temps à voyager au-dehors, ils avaient cultivé leurs terres, établi des manufactures et des verreries, ouvert des mines de fer, construit des navires ; et les pelleteries n’avaient passé chez eux que pour un accessoire sur lequel ils avaient toujours fait peu de fond.

On reconnaissait qu’enfin la nécessité avait réveillé les Canadiens ; ils s’étaient vus forcés de cultiver le lin et le chanvre, de faire des toiles et de mauvais droguets de la laine de leurs vieux habits mêlées avec du fil ; mais l’ancienne habitude d’une vie oisive avait fait durer une partie de leur misère. Ils avaient assez de blé et de bestiaux pour vivre tous ; mais plusieurs, n’ayant pas de quoi se couvrir, étaient obligés de passer l’hiver, toujours fort long et fort rude, avec quelques peaux de chevreuils. Cependant le roi dépensait annuellement cent mille écus dans cette colonie. Les pelleteries valaient environ 280,000 livres ; les huiles et quelques autres denrées en rapportaient 20,000 ; les pensions sur le trésor royal, que le roi faisait aux particuliers, et les revenus que l’évêque et les séminaires avaient en France, mon-