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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/378

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personnes considérables, et la famille doit avoir fait auparavant un festin au nom du mort, accompagné de jeux, pour lesquels on propose des prix. C’est une espèce de joute ; un chef jette sur la tombe trois bâtons de la longueur d’un pied ; un jeune homme, une femme et une fille en prennent chacun un, et ceux de leur âge et de leur sexe s’efforcent de les leur arracher des mains ; la victoire est à ceux qui les emportent. Il se fait aussi des courses, et l’on tire quelquefois au blanc. Enfin l’action la plus lugubre est terminée par des chants et des cris de victoire ; mais jamais la famille du mort ne prend part à ces réjouissances. On observe même un deuil sévère dans sa cabane ; chacun doit s’y couper les cheveux, s’y noircir tout le visage, se tenir souvent debout, la tête enveloppée dans une couverture, ne regarder personne, ne faire aucune visite, ne rien manger de chaud, se priver de tous les plaisirs, et ne se pas chauffer au cœur même de l’hiver. Après ce grand deuil, qui est de deux ans, on en commence un second, mais plus modéré, et qu’on peut adoucir par degrés. Pour le premier, on ne se dispense de rien sans la permission de la cabane, et ces dispenses sont toujours accompagnées d’un festin.

Un mari ne pleure point sa femme, parce que les larmes ne conviennent point aux hommes ; mais les femmes pleurent leur mari pendant une année entière, l’appellent sans cesse, et remplissent le village de cris, surtout au lever et au coucher du soleil, lorsqu’elles vont