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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 2.djvu/377

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autres qui se laissèrent mourir par une obstination désespérée à ne prendre aucune nourriture. Ils sont persuadés qu’en mourant ils retournent aussitôt dans leur patrie. On conseillait à Philips de faire couper à quelques-uns les bras et les jambes pour effrayer les autres par l’exemple. D’autres capitaines s’étaient bien trouvés de cette rigueur ; mais il ne put se résoudre à traiter avec tant de barbarie de misérables créatures qui étaient comme lui l’ouvrage de Dieu, et qui n’étaient pas, dit-il, moins chères au Créateur que les blancs. Il les avait pourtant fait marquer d’un fer chaud, comme des criminels, et les amenait enchaînés. Croyait-il ce traitement plus légitime aux yeux du Créateur ?

Philips, qui avait entendu vanter tant de fois les poisons des Nègres, et l’art avec lequel ils en infectent leurs flèches, eut la curiosité de prendre là-dessus des informations. Mais, pour les rendre plus certaines, il engagea un cabochir à le visiter dans le magasin. Là, il commença par lui faire avaler plusieurs verres de liqueurs fortes ; et, le voyant échauffé par le plaisir de boire ; il lui marqua une vive affection et lui fit divers présens : enfin il le pressa de lui apprendre de bonne foi comment les Nègres empoisonnaient les blancs, quel était leur secret pour communiquer le poison jusqu’à leurs armes, et s’ils avaient quelque antidote dont l’effet fût aussi sûr que celui du mal. Tout l’éclaircissement qu’il put tirer, fut