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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 25.djvu/120

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leurs paroles sur le même ton, ce qui excitait parmi eux des éclats de rire universels. Ils parlaient communément très-haut, et il semblait qu’ils s’entretenaient de nous : chaque nouveau-venu apprenait sur-le-champ des autres nos noms, qu’ils réduisaient à un petit nombre de voyelles et de consonnes plus douces ; et on ne manquait pas de l’amuser en lui racontant ce que nous avions dit ou fait le matin. Les derniers arrivés voulaient ordinairement entendre un coup de fusil ; nous y consentions, à condition qu’ils nous montreraient un oiseau pour but. Nous étions souvent embarrassés quand ils nous en indiquaient un éloigné de douze ou quinze cents pieds ; ils ne pensaient point que l’effet de nos armes à feu fût borné à un certain espace. Comme il n’était pas prudent de leur découvrir ce mystère, nous prétendions ne voir l’oiseau que lorsque nous étions assez près pour le tuer. La première explosion les effraya beaucoup, et produisit sur quelques-uns une consternation si forte, qu’ils tombèrent à terre, et s’enfuirent ensuite à environ soixante pieds de nous. Ils se tinrent ainsi à l’écart jusqu’à ce que nous eûmes calmé leurs craintes par des démonstrations d’amitié, ou jusqu’à ce qu’un de leurs compatriotes plus courageux eût ramassé l’oiseau que nous venions de tuer. Bientôt ils se familiarisèrent avec ce bruit, et quoiqu’ils exprimassent toujours quelque émotion soudaine, cependant peu à peu ils surmontèrent leur frayeur.