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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 25.djvu/223

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jeune et intelligent, entreprit de me détromper ; il s’expliqua de manière à ne me laisser aucun doute que c’était le roi ou le principal personnage de l’île. Je lui offris en présent ce que je destinais au vieux chef, une chemise, une hache, un morceau d’étoffe rouge, un miroir, quelques clous, des médailles et des verroteries. Il les reçut, ou plutôt il souffrit qu’on les mît sur sa personne et autour de lui sans rien perdre de sa gravité, sans dire un mot et sans tourner la tête ni à droite ni à gauche : il fut constamment immobile comme une statue. Je le laissai dans la même position quand je retournai à bord, et il se retira bientôt après. À peine fus-je arrivé au vaisseau, qu’on vint me dire que ce chef avait envoyé une grande quantité de provisions. Une chaloupe alla les prendre sur le rivage : elles consistaient en vingt paniers de bananes grillées, en ignames et fruits à pain, et un cochon rôti d’environ vingt livres. Mon détachement allait se rembarquer quand on apporta ces provisions au bord de l’eau : les insulaires dirent que c’était un présent de l’ériki, c’est-à-dire, du roi de l’île, à l’ériki du vaisseau. Je fus alors convaincu de la dignité de ce chef imbécille.

» Parmi les insulaires qui l’environnaient, nous reconnûmes, ajoute Forster, un prêtre qui, le lendemain de notre arrivée, nous avait conduits dans une espèce de temple ou cimetière : il prenait une quantité prodigieuse de boisson enivrante, qu’on lui servait dans de