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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 4.djvu/236

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fant pendant la nuit, leur paraissent des armes efficaces contre les esprits malins. Jamais un Amboinien ne vendra le premier poisson qu’il prend dans des filets neufs ; il en appréhenderait quelque malheur : mais il le mange lui-même ou le donne en présent. Les femmes qui vont au marché le matin avec quelques denrées donneront toujours la première pièce pour le prix qu’on leur en offre, sans quoi elles croiraient n’avoir aucun débit pendant le reste du jour. Aussi, lorsqu’elles ont vendu quelque chose, elles frappent sur leurs paniers, en criant de toute leur force que cela va bien. On ne fait pas plaisir aux insulaires de louer leurs enfans, parce qu’ils craignent que ce ne soit avec le dessein de les ensorceler, à moins qu’on n’ajoute à ces éloges des expressions capables d’éloigner toute défiance. Lorsqu’un enfant éternue, on se sert d’une espèce d’imprécation, comme pour conjurer l’esprit malin qui cherche à le faire mourir. Ces idées sont si invétérées dans la nation, qu’on entreprendrait vainement de les détruire. Les personnes mêmes qui ont embrassé le christianisme n’en sont pas exemptes. On n’admet point auprès d’un malade ceux qui seraient entrés peu auparavant dans la maison d’un mort. Les filles du pays ne mangeront pas d’une double banane, ou de quelque autre fruit double. Une esclave n’en présentera point à sa maîtresse, de peur que dans sa première couche elle ne mette deux enfans au monde, ce qui augmen-