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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/185

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rent jetés dans une profonde prison. Dès le lendemain, ils furent condamnés à la confiscation de leurs biens, et à demeurer prisonniers du roi, pour avoir été complices d’un projet de trahison contre les Bramas. De cent soixante-quatre, la faim, la soif et la puanteur d’un horrible cachot en firent périr cent dix-neuf dans l’espace d’un mois ; les quarante-cinq qui résistèrent à leurs souffrances furent mis dans une mauvaise chaloupe sans voiles et sans rames, et livrés au courant de la rivière, qui les entraîna jusqu’à la barre, d’où le vent les poussa dans une île déserte nommée Poulo-Coumoudé, qui est à vingt lieues de l’embouchure ; là ils se fournirent de quelques provisions de fruits qu’ils trouvèrent dans les bois. Ensuite s’étant fait une voile de deux habits, et deux rames de quelques branches d’arbres, ils suivirent la côte de Ionsalam et celle d’après, jusqu’à la rivière de Parlès, au royaume de Queda, où ils moururent presque tous de certains apostumes contagieux qui leur vinrent à la gorge ; enfin, n’étant arrivés que deux à Malacca, ils parlèrent de ma mort comme d’un malheur certain.

» En effet, je n’attendais que l’heure du supplice. Après le bannissement de mes compagnons, je fus transféré dans une prison plus éloignée, où je passai trente-six jours sous le poids de plusieurs chaînes. Gonzalo renouvelait continuellement ses accusations ; et mon chagrin ou ma fierté ne me permettant pas