Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/280

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prince s’y rend avec toute sa cour. Les adversaires s’y trouvent à la tête de ceux qui doivent combattre pour eux. La mêlée commence entre ces malheureux vassaux, qui ne doivent être armés que de deux petits coutelas à deux tranchans, et le combat ne finit ordinairement que par la mort de tous les braves d’un des deux partis. La victoire décide de la meilleure cause. Alors les deux naïres se réconcilient tranquillement, avec peu de regret du sang qui s’est versé pour eux, et dans l’orgueilleuse idée que leur propre sang est trop noble et trop précieux pour être répandu dans toute autre cause que celle du prince ou de l’état. Entre ces misérables victimes de la vengeance de leurs maîtres, il est assez ordinaire que les vainqueurs mêmes qui ont survécu à leurs ennemis jouissent peu de la victoire, parce qu’ils ne sortent d’un combat si désespéré qu’avec des blessures mortelles.

En général, les Malabares sont fort patiens. Ils s’abandonnent rarement à la colère ; s’ils se vengent, c’est toujours par les voies de l’honneur. Ils ont tant d’horreur pour le poison, qu’à peine savent-ils de quoi il peut être composé, quoique ce détestable usage soit fort commun dans tous les autres pays de l’Inde.

Dans leurs guerres, ils ne connaissent aucun ordre. On ne les voit observer ni rang, ni marche régulière, ni la moindre apparence de discipline. Les rois de cette contrée ne cherchent point à s’agrandir par l’usurpation des