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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/130

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mais qu’il n’avait avec lui aucun livre défendu, et que, sachant les ordres du tribunal, il avait laissé sa bible à Mengrela. L’entretien devint fort agréable, et roula sur les voyages de Tavernier, dont toute l’assemblée parut entendre volontiers le récit. Trois jours après, l’inquisiteur le fit prier à dîner avec lui, dans une fort belle maison qui est à une demi-lieue de la ville, et qui appartient aux cannes déchaussés. C’est un des plus beaux édifices de toutes les Indes. Un gentilhomme portugais, dont le père et l’aïeul s’étaient enrichis par le commerce, avait fait bâtir cette maison, qui peut passer pour un beau palais. Il vécut sans goût pour le mariage ; et, s’étant livré à la dévotion, il passait la plus grande partie de sa vie chez les augustins, pour lesquels il conçut tant d’affection, qu’il fit un testament par lequel il leur donnait tout son bien, à condition qu’après sa mort ils lui élevassent un tombeau au côté droit du grand-autel. Quelques-uns de ces religieux lui ayant représenté que cette place ne convenait qu’à un vice-roi, et l’ayant prié d’en choisir une autre, il fut si piqué de cette proposition, qu’il cessa de voir les augustins ; et sa dévotion s’étant tournée vers les carmes, qui le reçurent à bras ouverts, il leur laissa son héritage à la même condition.

Tavernier, voulant visiter l’île de Java, résolut de porter des pierreries au roi de Bantam. Il trouva ce prince assis à la manière des