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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/321

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mollahs, en leur demandant la grâce d’être un des onze qui soulèveraient la pierre. Une seconde roupie qu’il leur jeta, jointe à la persuasion qu’il affectait de la vérité du miracle, les disposa, quoique avec peine, à lui céder une place. Ils s’imaginèrent apparemment que dix d’entre eux, unis ensemble, suffiraient pour lever le fardeau, quand même il n’y contribuerait que fort peu ; et qu’en se rangeant avec adresse et se serrant, ils pourraient l’empêcher de s’apercevoir de rien. Cependant ils furent bien trompés lorsque la pierre, que Bernier ne voulut soutenir que du bout du doigt, pencha visiblement de son côté. Tout le monde le regardant d’un fort mauvais œil, il ne laissa pas de crier karamet, et de jeter encore une roupie, dans la crainte de se faire lapider ; mais, après s’être retiré tout doucement, il se hâta de monter à cheval et de s’éloigner.

En passant il observa cette fameuse ouverture qui donne passage à toutes les eaux du royaume ; ensuite il quitta le chemin pour s’approcher d’un grand lac, dont la vue l’avait frappé de loin, et par lequel passe la rivière qui descend à Baramoulay. Il est plein de poissons, surtout d’anguilles, et couvert de canards, d’oies sauvages, et de plusieurs sortes d’oiseaux de rivière. Le gouverneur du pays y vient prendre en hiver le divertissement de la chasse. On voit au milieu de ce lac un ermitage, avec son petit jardin qui, à ce qu’on dit,