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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/320

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en chemin avec son escorte ordinaire ; il se rendit à Baramoulay, et trouva le lieu assez agréable ; la mosquée est bien bâtie, et les ornemens ne manquent point au tombeau du saint. Il y avait tout autour quantité de pèlerins qui se disaient malades ; mais on voyait près de la mosquée une cuisine, avec de grandes chaudières pleines de chair et de riz fondées par le zèle des dévots, que Bernier prit pour l’aimant qui attirait les malades, et pour le miracle qui les guérissait.

D’un autre côté, étaient le jardin et les chambres des mollahs, qui passent là doucement leur vie à l’ombre de la sainteté miraculeuse du pire qu’ils ne manquent pas de vanter. Toujours malheureux, dit-il, dans les occasions de cette nature, il ne vit faire aucun miracle pendant le séjour qu’il fit à Baramoulay ; mais onze mollahs formant un cercle bien serré, et vêtus de leurs cabayes ou longues robes, qui ne permettaient pas de voir comment ils prenaient la pierre, la levèrent en effet, en assurant tous qu’ils ne la tenaient que du bout de l’un de leurs doigts, et qu’elle était aussi légère qu’une plume. Bernier, qui ouvrait les yeux, et qui regardait de fort près, s’apercevait assez qu’ils faisaient beaucoup d’efforts, et croyait remarquer qu’ils joignaient le pouce aux doigts. Cependant il n’osa se dispenser de crier karamet ! karamet ! c’est-à-dire miracle ! miracle ! avec les mollahs et tous les assistans ; mais il donna en même temps une roupie aux