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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 7.djvu/279

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Ils attachent encore plus d’opprobre au vol. Les plus proches parens d’un voleur n’osent prendre sa défense. « Il n’est pas étrange, suivant Laloubère, que le vol soit estimé infâme dans un pays où l’on peut vivre à si bon marché. » Ils mettent l’idée de la parfaite justice à ne pas ramasser les choses perdues ; c’est-à-dire, à ne pas profiter d’une occasion d’acquérir si facile. Il paraît cependant, par plusieurs traits que racontent les voyageurs, que les Siamois négligent rarement l’occasion de voler, malgré l’infamie qu’ils attachent au vol.

Le P. d’Espagnac, un des missionnaires jésuites du second voyage de Tachard, étant un jour seul dans le divan de leur maison, vit un Siamois qui vint prendre hardiment devant lui un beau tapis de Perse sur une table. Ce bon jésuite laissa faire le voleur, parce qu’étant apparemment dans la même prévention que Laloubère, il ne put se persuader que ce fût un vol. On sait que dans le voyage que Louis XIV fit faire en Flandre aux ambassadeurs de Siam un des mandarins qui les accompagnaient prit une vingtaine de jetons dans une maison où ils étaient priés à dîner. Le lendemain, ce mandarin persuadé que les jetons étaient de la monnaie, en donna un pour boire à un laquais. Son vol fut reconnu par son imprudence ; mais on n’en témoigna rien.

Laloubère raconte lui-même un autre trait qui prouve la force du penchant des Siamois pour le vol. Un officier des magasins du roi