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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/101

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Il jugeait donc des coups en faisant ses réflexions ; Colletti, le Napolitain, lui rendait la réplique.

Le Camard et Brise-Barrot, sortis du fort, vers le soir, comme Ulysse et Diomède, sinon pour aller enlever des chevaux, du moins pour tâcher de prendre un bœuf, furent tout d’abord servis à souhait, car, à moins d’un mille du fort, sur le bord de la rivière, ils trouvèrent tout un troupeau.

— Mille diables !… fit Le Camard, quelle chance !… nous allons ramener au Fort-Dauphin de quoi manger à bouche que veux-tu.

Brise-Barrot, le canonnier, hocha la tête en mettant le pouce sur son œil gauche.

— Je ne donnerais pas six sous de ta peau, dit-il, et, quant à la mienne, mettons que j’eusse mille piastres, je les donnerais pour la savoir ailleurs ; – ce troupeau est une amorce, vrai comme je suis fils de Mars.

— Chien de chien ! ça se pourrait ! fit le Camard.

— Laissons-là les bœufs, faisons le tour, allons tordre le cou à quelques volailles dans le village de Fanshère. Pendant que les Malgaches nous attendent en embuscade dans les halliers, nous filerons par eau… – À la nage ? – Ou en pirogue s’il y a moyen.

Les aventuriers rampaient tous avec une agilité merveilleuse.

— Ne pas même tuer un veau ! murmura Le Camard en soupirant.

La retraite des deux maraudeurs fut d’abord assez heureuse. Du Fort-Dauphin au pâturage, leur marche silencieuse avait été protégée par les bois-taillis et l’obscurité. Un sentier rocailleux, qui longeait la baie Dauphine, les conduisit sans fâcheuse rencontre jusqu’au troupeau.

Quelques indigènes pourtant les avaient aperçus ; mais suivant les ordres de leur chef, ils les laissèrent passer.