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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/189

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« – Il attend, s’écria Salomée avec chaleur, que vous ne formiez qu’une seule immense nation ; il attend que Cimanour, le roi des Sakalaves, cesse de menacer son autorité…

« – Je suis prêt à te fournir six mille guerriers, répartit le prince des Bétaniménes.

« – Et moi, ajouta celui des Bétimsaras, je marcherai moi-même sous tes ordres à la tête de mes plus vaillants serviteurs.

« À l’exception de quelques peuplades sauvages de l’intérieur, je voyais donc se ranger sous le drapeau de la France tous les peuples qui occupent les côtes méridionales et orientales, depuis la rivière qui se décharge dans la baie Saint-Augustin, jusqu’au port Louquez situé à soixante lieues environ de notre établissement central. Un littoral immense, c’est-à-dire la bande qui s’étend du Fort-Dauphin à Tamatave, n’avait reçu ni poste ni comptoir français. – Il ne me fallait qu’un triomphe comme la conquête du pays des Sakalaves pour devenir le médiateur suprême, l’Ompiandrian de Madagascar. – Et je manquais, hélas, de munitions, d’armes et de troupes ! – En moins de deux ans, par mes propres forces, j’avais amené près de la moitié des Malgaches à se déclarer pour moi : n’allais-je point échouer au port ?

« À Tamatave, après la conférence admirable dont je viens de vous faire entrevoir toute l’importance, un découragement amer s’empara de moi. – Je passai la nuit entière sur le pont du navire, à méditer et à examiner ma position ; par moments, une sueur froide me glaçait :

« Point de nouvelles d’Europe ! Toujours des ennemis acharnés dans les colonies françaises ! Je n’avais d’autre ressource que ma fermeté contre le malheureux destin qui me poursuivait. Je voyais avec inquiétude l’approche de la mauvaise saison durant laquelle, si nous étions toujours privés de secours,