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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/205

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— Mes grognards, mes pendards, mes enragés en bloc, mon général, dit-il, ne seront pas de trop pour forcer la ligne. Permettez-moi de réformer ma vieille compagnie.

— Non ! certainement, cria Béniowski, vous désorganiseriez tous nos corps réguliers dont vos braves compagnons sont les adjudants ou les sergents ; un coup de canon à mitraille risquerait de les faucher d’un coup. Si la position de l’ennemi est trop forte, nous la tournerons. Je vous laisserais dans les bois et vous chargerais de la garde de notre camp, tandis qu’avec le reste de l’armée j’irais détruire les villages et les villes de Boyana.

Le chevalier, tout en mâchant sa moustache, se remit à la tête de l’aile gauche. L’armée s’engageait dans la forêt, où elle ne devait pas rencontrer d’ennemis, tant Barkum se croyait sûr de la victoire.

Béniowski, arrivé enfin sur la lisière des bois, sourit avec dédain :

— Eh ! quoi, s’écria-t-il, nos savants adversaires se barricadent, ils nous laissent le champ libre !… Le plus fort est fait puisque nous sommes hors des fourrés, où leur rôle eut été d’entraver notre marche par cent combats partiels.

L’aile droite reçut l’ordre d’aller jeter un pont hors de portée de canon au-dessous du courant ; l’aile gauche devait chercher un gué ; Béniowski se tint au centre avec toute son artillerie et sa petite cavalerie. La comtesse et Wenceslas, entourés par leurs gardes que commandait Alexandre de Nilof, restèrent sur une hauteur d’où l’on dominait l’immense plaine aux trois collines.

Les Sakalaves, réduits à l’inaction par la distance qui les séparait de l’ennemi, voyaient déjà, non sans craintes, la multitude armée qui se déroulait au nord et au sud de leurs retranchements.