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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/255

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depuis longtemps monsieur du Capricorne ; il m’invite à déjeuner, je vais lui parler en votre faveur.

Au Fort-Dauphin, Kerléan apprit, de la bouche royale de Capricorne Ier, la fin tragique du baron de Luxeuil :

— Ah ! monsieur le major ! s’écria-t-il, vous m’avez soufflé ce duel ! Depuis la Pomone, j’avais un compte à régler avec l’impertinent baron.

— Rattrapez-vous aux dépens de Stéphanof, mon cher monsieur de Kerléan, si bon vous semble.

— Stéphanof ! de qui me parlez-vous ?

— Du commandant Frangon, ci-devant Estève Finvallen, autrefois Hippolyte Stéphanof, le plus détestable Kosaque de toutes les Russies…

Après d’inévitables récits assaisonnés par la verve de Capricorne Ier, la question politique et commerciale fut traitée à fond :

— Monsieur de Ternay, monsieur Maillart du Mesle, les commissaires du roi de France et le ministre de la marine nous ont fait du chagrin dans le Nord, voici dix-huit mois ; en conséquence, le comte de Béniowski s’est laissé proclamer roi des rois, et a bien voulu me nommer moi-même roi d’Anossi… Tel que vous me voyez, commandant, je suis Sa Majesté Capricorne Ier. Nous avons pris pour couleur le bleu ; un pavillon bleu flotte sur ma porte de terre. Mais je suis bon prince ; mon cousin le roi de France a quelques droits sur ce fort, je ne les conteste pas, et j’arbore pavillon blanc sur la porte de mer. – Ses colonies de l’Île-de-France et de Bourbon trouveront toujours ici des bœufs, du riz, du bois, tout ce qu’il leur faudra. Vivons en paix !… Je ne demande pas mieux ! – Quant à votre Stéphanof, qu’il ne me tombe jamais sous la patte… mordious ! sapredious ! – À votre santé, commandant !

— À votre santé, sire… car, entre nous, la conduite du gou-