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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/296

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premiers colons, et le Fort-Dauphin s’élève dans la presqu’île de Tolangare à trois lieues environ de la rivière de Fanshère sur le territoire d’Anossi.

La colonie naissante se soutint, tandis que les Anglais, à la même époque, échouaient dans leur tentative de la rivière Saint-Augustin. Il est digne de remarque que les gens de Pronis trouvèrent déjà dans le pays un certain nombre de matelots dieppois établis parmi les naturels et qui trafiquaient avec eux. Pronis sut se faire un parti chez les indigènes, et selon toute apparence, l’entreprise eût parfaitement réussi dès l’origine, si ses malversations et ses exactions n’avaient provoqué des révoltes continuelles.

Il n’avait pu empêcher de construire une chapelle où un aumônier catholique célébrait les offices ; mais il était huguenot, avait amené avec lui sept ou huit de ses co-religionnaires, et prenait à tâche de contrarier les colons et les soldats fidèles. « Tout en laissant dire la messe, il faisait faire le prêche en sa maison.[1] » – Les indigènes étaient étonnés de voir deux sortes de religion parmi les Français, et il s’ensuivit que les efforts des prédicateurs français ne furent pas moins infructueux que ceux des missionnaires portugais venus de Goa en 1615 et 1616.

La compagnie ou Société de l’Orient pourvut enfin au remplacement de Pronis, et, en 1648, lui donna pour successeur un homme habile et très énergique, Etienne de Flacourt, à qui est due la précieuse Histoire de la grande isle de Madagascar. Il y entre dans les détails les plus curieux et les plus circonstanciés sur les mœurs, les usages, les croyances des indigènes, sur la nature, sur les productions et les divisions territoriales de l’île entière.

L’administration de Flacourt est remarquable par l’esprit de ressource dont il fit preuve en maintenant son autorité, quoique la compagnie le laissât sans secours. En 1649, il envoya prendre possession de l’île Mascarenhas (Mascareigne), à laquelle Pronis, qui l’y avait précédé, donna le nom d’île Bourbon.

  1. Lettre du P. lazariste Naquart à saint Vincent de Paul, – Histoire de Madagascar, par le P. de la Vaissière, t. I, p. 8.