Page:La Saga de Fridthjof le Fort, trad. Wagner, 1904.djvu/16

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duire de l’effet. Il se contente de laisser parler les faits et les situations, et c’est là ce qui donne à ses récits tant d’attrait, de saveur et d’éloquence.

Dans quelle catégorie convient-il de ranger la saga de Fridthjof ? C’est une question à laquelle il serait présomptueux de vouloir répondre d’une manière précise et absolue. L’aspect particulier qu’elle offre ne permet pas de lui assigner, parmi ses congénères, une place nettement déterminée. F. W. Horn (Gesch. d. Lit. des skand. Nord., p. 60) et Ph. Schweitzer (Gesch. d. altskand. Litt., p. 82), dans leur énumération, la citent parmi les sagas dont les éléments sont à la fois empruntés à la mythologie, à la légende et à l’histoire, et l’envisagent au même point de vue que la Völsunga saga, la Hervarar saga, la Hálfs saga, la saga de Ragnar Lodbrók et plusieurs autres qui sont la transcription en prose et la paraphrase de vieilles poésies mythologiques et héroïques reproduites en partie et disséminées dans les récits. Si, comme on doit le croire, la saga de Fridthjof est née de la dissolution en prose d’anciens chants populaires, rien ne nous autorise cependant à lui attribuer un caractère mythologique. Les scènes pittoresques relatives au culte du dieu Baldr et certains traits surnaturels (comme l’intervention néfaste des magiciennes), tout imprégnés des conceptions bizarres et des idées naïves des âges primitifs, tiennent tout simplement aux antiques croyances populaires et ne constituent pas des éléments suffisants pour voir dans les épisodes merveilleux le reflet de légendes mythologiques. La saga de Fridthjof est une de ces histoires foncièrement et purement poétiques, comme le moyen âge scandinave en a vu naître quelques-unes (cf. la saga de Gunnlaug), petits chefs-d’œuvre du genre