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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/159

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

porphyre et qu’elles aimeront, naturellement…

Mais ce prince-là doit être rudement occupé par ailleurs, car il se fait attendre, et déjà plusieurs des soupirantes qui guettent sa venue au petit café ont passé l’âge de plaire. Qu’importe, quand on a la foi !

Deux de mes « collègues » m’ont prise en amitié, deux antithèses extraordinaires qui sont inséparables ; on dit qu’elles s’aiment plus que platoniquement et c’est peut-être vrai. Mais bah ! dans cette société, c’est de la monnaie courante et on désigne déjà « l’amant » qui m’aimera.

Louisa est grande, grosse, rousse et très bête. Cléo, par contre, est presque naine, mince comme une anguille, noire partout, mais d’une intelligence très vive. On les appelle quelquefois Porthos et Aramis, par comparaison.

Toutes deux semblent s’adorer et elles se baisent sur la bouche à chaque instant ; quand Louisa est un peu grise, ce qui d’ailleurs lui arrive fréquemment, elle prend Cléo dans ses bras, la berce ainsi qu’un bébé et lui donne son gros nichon à téter. C’est d’un drôle.