Aller au contenu

Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
153
LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

tour, je pousse le verrou et seulement alors, je me sens un peu rassurée…

Mais c’est un cauchemar qui me poursuit jusque dans mes rêves où dansent en rond, avec des grimaces affreuses, toute une bande de souteneurs débraillés, le couteau entre les dents…

Il faut que ça finisse… j’ai trop peur. Je vais déménager… j’irai cohabiter avec une « collègue », avec « l’amant » qu’on m’a désigné… Je n’y gagnerai rien en vertu, au contraire, mais au moins je n’aurai plus peur…

Telle une autre épée de Damoclès suspendue sur ma tête, il y a encore la carte… Oh ! cette carte, les agents, le dépôt, Saint-Lazare… Quand j’y pense, j’ai un frisson dans le dos et je blêmis au récit des rafles sauvages qui chassent les filles en un troupeau affolé, dans les serres des flics… Puis le Dépôt, l’ignoble entassement, le pêle-mêle écœurant des ivrognes, des hystériques en proie aux crises, des sadiques en mal d’aimer…

Et le panier à salade cahotique avec son inévitable garde, la prison noire, lugubre, triste à mourir, les travaux déprimants et mo-