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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/177

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

les étudiants l’avaient suivi et il n’y avait plus que nous, Pierre, Mlle Marguerite et les externes, dans la salle. La plupart des malades valides étaient descendus, en savate et en capote bleue, dans le jardin ; les autres lisaient les journaux apportés par une vieille femme.

Et je ne sais pourquoi mon regard avait cherché le regard du joli brun, au moment où il s’en allait ; lui, il s’était retourné et m’avait fait un petit signe de tête, comme pour dire : au revoir, à demain…

Après le déjeuner, Pierre, qui se reposait un instant sur un brancard inoccupé, me questionna tel un juge d’instruction.

Vrai, il lui en fallait des explications, et je m’amusais à le faire marcher en lui contant que j’étais fille d’une comtesse étrangère, venue à Paris pour me dévouer au service des malades, et un tas d’autres bourdes plus grosses les unes que les autres. Pierre avalait tout, comme du pain frais. À la fin, les voisins qui s’amusaient beaucoup des mines ahuries de Pierre surenchérirent encore et il s’aperçut pourtant qu’on se payait sa tête. Mais lui, en gros paysan qu’il était, n’en demeura pas moins convaincu que j’étais un phéno-