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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/249

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

Ce coup-là, j’eus peur. Je fis venir le père Boche, le bon vieux père Boche. Il ne me reconnut pas. Après un examen sérieux, il fronça le sourcil et m’ordonna de filer à la montagne, au galop. Mon mal était grave, mais je pouvais m’en tirer, avec de la volonté et une hygiène sévère. Il m’indiqua Leysin. Ce fut pour moi une révélation. J’étais phtisique et le père Boche devait me trouver bien malade, pour faire un tel nez.

Le lendemain, je refermai sur moi la portière d’un wagon-lit, et en route vers Leysin, vers la guérison, vers la vie. Oui, je voulais vivre, je voulais jouir encore du soleil, des fleurs, de la nature, maintenant que j’étais riche et que je pouvais éviter la boue et la saleté. J’allais vers la guérison, vers le grand ciel pur où rien ne trouble les pensées, où la honte du passé s’évanouit dans la splendeur des crépuscules violets et des horizons majestueux.

Leysin, l’espoir, la délivrance !

J’ai bien mal. Je tousse sans cesse, et du sang me vient aux lèvres, à chaque instant. La fièvre me brûle… je suis si lasse, je suis si fatiguée.