Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/164

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et dont il est intéressant de suivre les procédés ou les manèges dans leurs méandres si dextrement tracés.

Faut-il croire, comme certains l’en soupçonnent[1], qu’il ait gardé un silence calculé sur plusieurs parties de la dogmatique chrétienne, par exemple sur la Trinité, à laquelle il ne fait qu’une seule allusion[2], sur l’Esprit saint, qu’il nomme tout juste trois ou quatre fois dans tout l’ouvrage, sur les sacrements, qu’il laisse presque complètement de côté, sur les concepts de rédemption, de justification, de grâce, de péché ?

Mais, s’il entreprenait de réfuter Celse point par point, quelle nécessité le pressait, lui qui avait déjà tant à dire, d’aborder des questions plus ou moins épineuses que le philosophe païen n’avait pas effleurées ? C’eût été surcharger son apologie, déjà si dense, au point de la rendre presque insoutenable. S’il a négligé d’importants chapitres de la théologie, cela prouve seulement que Celse n’avait envisagé le christianisme que du dehors, sans se hasarder dans le détail de ses doctrines. Sur le problème des deux « natures » du Christ, l’humaine et la divine, il ne s’est pas dérobé, les attaques de Celse l’ayant contraint à des explications encore plus ardues que certaines de celles qu’on lui reproche d’avoir éludées.

Non, son savoir-faire, qui est évident, ne va pas jusqu’à l’escamotage des difficultés. Ses réponses sont ordinairement d’une franchise très directe. Il lui arrive, certes, d’alléguer des preuves ruineuses et de commettre des maladresses[3].

  1. Par exemple, Mme Miura-Stange, op. cit., p. 26 et 162.
  2. VII, 10.
  3. Certaines de ses erreurs reposent sur des théories scientifiques inexactes, généralement acceptées de son temps. Par exemple, la parthénogénèse de certains animaux (I, 37) : les abeilles naissant du cadavre d’un bœuf, les guêpes