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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/165

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Mais les pages fortes et pleines (par la pensée plus encore que par le style, dont les enchevêtrements et les lourdeurs décèlent une parole dictée) ne sont pas rares dans son apologie.

C’est ainsi qu’il démontre en termes excellents à Celse que les coups par lesquels il essaie d’atteindre le christianisme portent plus loin qu’il ne voudrait ; qu’ils risquent de blesser toute croyance spiritualiste, quelle qu’elle soit. Le dédain que Celse affiche à l’égard des spéculations chrétiennes sur Dieu, l’homme, l’univers, ne va à rien de moins qu’à ridiculiser toute spéculation, au bénéfice du scepticisme pur[1]. Celse affecte de ravaler l’homme ; on dirait qu’il veut l’obliger à se mépriser tout entier : a-t-il réfléchi qu’il compromet ainsi l’effort de tant de philosophes pour définir la place de l’homme dans la création et la sollicitude que la Providence étend sur lui[2] ? C’est la civilisation qui risque de pâtir de ses attaques ; par la façon dont il déprécie au bénéfice des fourmis et autres animaux le bienfait de la solidarité humaine, il décourage l’esprit de charité :

Celse ne voit pas que, dans son dessein de détourner du christianisme ceux qui liront son livre, il ôte du cœur des non-chrétiens eux-mêmes toute pitié pour ceux qui peinent sous le lourd fardeau de la vie[3].

Pareillement :

Celse a l’air d’admettre comme légitime la doctrine d’après laquelle ceux qui auront mené une vie moralement bonne obtiendront la félicité, tandis que les méchants subiront d’éternels supplices. De cette doctrine, déclare-t-il, ni les chrétiens, ni personne ne doit se départir.

    de celui d’un cheval, les serpents de celui d’un homme, etc. (IV, 57 : cf. Pline l’Ancien, X, 66, 188 ; XI, 20, 70).

  1. IV, 30.
  2. IV, 81.
  3. IV, 83.