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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/188

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tirés des livres chrétiens. Connaissant les sympathies non douteuses de Julia Mamaea pour l’élite chrétienne, il n’a pas dû être fâché de transposer sur la tête d’Apollonius le nimbe de sainteté dont rayonnait le front du Christ, aux regards de ses fidèles, et même des simples « sympathisants ». Mais il a eu cette habileté de ne faire aucune allusion directe au christianisme, de n’en esquisser nulle part la parodie, et de suggérer des conclusions qu’il ne formule nulle part lui-même. En sorte que beaucoup se demandent encore si l’idée de substituer un « Christ hellénistique » au Christ de l’Église s’était vraiment formée d’une façon ferme et systématique dans son esprit[1].

Philostrate n’a pas évité ce parallélisme ; il ne lui à pas déplu d’en imposer l’évidence à ses lecteurs. Mais il ne l’a nulle part poussé à bout, et n’y a même pas appuyé d’un crayon bien diligent. Ce n’est pas un sectaire ; c’est peut-être un habile homme.

VIII

Son livre obtint un succès très vif : l’image de ce Pythagore modernisé et mis au goût du jour, de cet être quasi-divin qui avait pratiqué les plus hautes vertus, et disposé de pouvoirs surnaturels grâce à sa piété envers les dieux, s’imposa aux imaginations. Au témoignage de Dion Cassius[2] Caracalla éleva un sanctuaire à Apollonius ;

    quand on connaît les préoccupations du « milieu » que fréquentait Philostrate. Voy. les fortes objections de M. Goguel dans la Revue de Philologie, 1928, p. 245 et s.

  1. Cet état d’esprit est poussé jusqu’à l’absurde par J. Miller, qui écrit dans la Real.-Enc. de Pauly-Wissowa, II, 146 : « Cette biographie n’est influencée par aucune tendance philosophique et religieuse. »
  2. lxxviii, 18.